L’imagerie vétérinaire : L’essor d’une spécialité tournée vers l’avenir

Le statut de l’animal de compagnie ne cesse d’évoluer depuis plusieurs décennies. Une étude récente menée par Fidanimo et l’IFOP rappelle que 44% des français possèdent un animal de compagnie et que 2 personnes concernées sur 3 considèrent leur animal comme un membre à part entière de leur famille. La même étude estime à 20,8 le nombre de visites chez le vétérinaire au cours de la vie de l’animal et tend à montrer que les propriétaires s’inquiètent toujours plus de la santé de leurs compagnons.
Profitant de cet essor sans précédent, l’imagerie devient une spécialité à part entière pour les vétérinaires. A ce titre, L’Autorité de Sureté Nucléaire (ASN) rapporte qu’en 2021, 90% des structures vétérinaires françaises étaient équipées d’au moins un appareil d’imagerie, toutes modalités confondues. Les équipements lourds (scanner/ IRM) sont toujours plus nombreux dans les cliniques vétérinaires et les constructeurs ne s’y trompent pas en développant des gammes d’équipements spécialisés dédiés. Toutes les spécialités et toutes les modalités sont concernées : Radio, échographie, scanner, IRM. En effet, l’imagerie dédiée aux animaux ne se borne plus à la radiographie et à l’échographie. L’imagerie en coupe (scanner, IRM), la médecine nucléaire et même la radiothérapie sont aujourd’hui utilisées lors de la prise en charge des animaux malades.
Un outil devenu indispensable au diagnostic :
Si par exemple, le coût d’un scanner pour un chien reste non négligeable (entre 350 et 800 euros selon la taille de l’animal et la nécessité de réaliser une injection ou non), la démocratisation des assurances qui prennent en charge, tout ou partie des frais lié aux soins et frais d’hospitalisation, aide certainement au développement de ces technologies de pointe et de fait, à l’augmentation de la précision diagnostique. A noter qu’en ce qui concerne le scanner et l’IRM, l’immobilité requise pour ces examens suppose qu’ils soient réalisés sous anesthésie générale, ce qui justifie en partie leur coût élevé.
Figure 1 Photo Vétomega – Grenoble
« Endormir » son patient de façon quasi systématique est une différence notable si l’on compare le mode de réalisation d’un examen vétérinaire à celui d’un examen de médecine « humaine ». Hormis ce détail non négligeable, le principe de réalisation d’un scanner ou d’une IRM reste inchangé : installation, centrage, acquisition +/- injection. Comme en médecine classique, de nombreuses indications peuvent être à l’origine de la prescription d’un scanner pour un chien ou un chat : troubles neurologiques, troubles respiratoires, bilan de masse, bilan d’extension des tumeurs, anomalies vasculaires, traumatologie etc…
Figure2 Scanner thoracique d’une tumeur pulmonaire [LINK]
Si votre animal doit passer une IRM, il devra bien sûr respecter les contre-indications (absence de dispositif métallique ferromagnétique, etc…) Là aussi, de nombreuses indications peuvent conduire à la réalisation d’une IRM : bilan rachidien, tumeurs osseuses, orthopédie (épaule, genoux), tumeurs de la tête, etc…
Figure 3 [LINK] discale (hernie de type I) sur une image de CT reformatée en plan sagittal (A) et sur une image d’IRM pondérée en T2 dans le plan sagittal (B).
En tout état de cause, le développement de l’imagerie vétérinaire permet un diagnostic plus précis et plus rapide. A en croire les perspectives présentées par gminsights.com, concernant le développement du marché de l’imagerie vétérinaire dans le monde ça n’est pas près de s’arrêter…
En effet, Si l’Atlas démographique 2023 des vétérinaires, rapporte qu’en 2022, la médecine et la chirurgie des animaux de compagnie représente plus de 70% de l’activité globale, les animaux de rente, les équidés, les animaux sauvage issus des parcs zoologiques peuvent aussi bénéficier de technologies d’imageries de pointe. Ainsi l’Autorité de Sureté Nucléaire et de Radioprotection consacrait récemment un numéro de REPERES au Zoo Parc de Beauval et à son « service » d’imagerie dont pouvaient bénéficier des pensionnaires à plumes et à poils. .
Figure 4 © ZooParc de Beauval
Développement de l’oncologie et de la Radiothérapie :
L’amélioration de la qualité des soins apportée aux animaux de compagnie entraine une augmentation de l’espérance de vie des chats et des chiens. Dans ce contexte, le développement des pathologies cancéreuses augmente aussi et les propriétaires sont toujours plus désireux de proposer une prise en charge adaptée et personnalisée à leur compagnon à 4 pattes. Comme en médecine humaine, le traitement peut s’articuler autour de 3 axes : chirurgie, chimiothérapie et radiothérapie. Le choix dépend du type de tumeur, du stade de développement de la maladie, de l’état général de l’animal, ainsi que des limites logistiques et financières du propriétaire, facteurs essentiels à prendre aussi en compte. En ce qui concerne la radiothérapie, selon le site Anicura, il n’existerait que 2 centres de radiothérapie vétérinaire en France. Selon l’ASN (Autorité de Sûreté Nucléaire), en mai 2022, il n’y avait à l’échelle nationale que des projets de centre de radiothérapie vétérinaire. Mais aucune mise à jour entre 2023 et 2025 ne vient confirmer officiellement les chiffres d’Anicura
En Belgique, l’Université de Liège possède, quant à elle, l’unique centre de radiothérapie vétérinaire du pays et peut ainsi participer à l’amélioration de la prise en charge des animaux cancéreux. La radiothérapie peut être adjuvante ou être utilisée seule, comme en médecine humaine et la planification d’un traitement en radiothérapie vétérinaire est identique à la planification en médecine humaine et nécessite un scanner de centrage et un plan de dosimétrie.
Figure 5 Plan de dosimétrie pour la planification d’un traitement par radiothérapie d’une tumeur cérébrale chez un chien : contourage (définition des volumes cibles et à risque) Revue médicale Liège 2024-Hamaide A, Benoit J
Quelle place pour les manips radio ?
A ce jour, il n’existe pas en France de module consacré à l’imagerie vétérinaire lors de la formation initiale que ce soit pour le DE de MERM ou le DTS. Pour autant, les recruteurs cherchent de plus en plus à intégrer des manipulateurs diplômés et les offres d’emplois se font de plus en plus fréquentes. Connaissance du soin, compétences acquises en imagerie, radioprotection, injection de produits de contraste, les vétérinaires ont aussi besoin de professionnels présentant toutes ces compétences pour réaliser les examens de nos animaux. En 2021, l’école lyonnaise VetAgroSup brossait déjà le portrait de la manip radio de son hôpital Johanna qui a choisi le milieu vétérinaire dès l’obtention de son diplôme.
D’un point de vue légal et administratif, le Code de la santé publique (CSP) stipule clairement que Les MERM exercent exclusivement dans le domaine de la santé humaine (articles L4351-1 et suivants). Par ailleurs seuls les vétérinaires inscrits à l’Ordre ont le droit d’exercer des actes de diagnostic, dont les examens radiologiques ou échographiques, sur les animaux. Ils peuvent toutefois déléguer la réalisation technique de certains actes à du personnel salarié, sous leur responsabilité. Un vétérinaire peut donc tout à fait embaucher un manipulateur radio pour l’assister dans la réalisation des examens (radiologie conventionnelle, scanner, IRM, etc.).
Comme en médecine humaine, Le MERM n’agit pas en autonomie : les actes relèvent toujours de la responsabilité médicale du vétérinaire. Pour autant, aucun texte n’impose de cursus complémentaire obligatoire, mais certaines cliniques spécialisées peuvent demander une formation en imagerie vétérinaire (formations continues, DU, séminaires organisés par l’AFVAC ou l’Association internationale des Etudiants Vétérinaires).
Le métier de manipulateur en radiologie, (qui, nous ne le redirons jamais assez est un métier de soignant !!!) suppose une certaine empathie, un amour vrai des gens. Dans le cas de l’imagerie vétérinaire Le témoignage de Martine technicienne en radiologie médicale (TRM) , en Suisse, nous rappelle que « Être TRM dans une clinique vétérinaire demande une grande capacité d’adaptation, parfois une peu d’audace, une envie d’apprendre par soi-même et une affinité pour les animaux.
Le travail y est extrêmement varié et permet de développer une posture réflexive, ainsi que de déployer des trésors d’inventivité. »
Faisons le pari, que d’ici quelques années, l’imagerie vétérinaire deviendra un nouveau pôle d’attractivité au sein de toutes les possibilités qu’offre le métier de Manip Radio. En tout cas, souhaitons le, pour tous les patients à 4 pattes !